LES CONDENSATEURS DE DECOUPLAGE

 Le rôle des condensateurs de découplage n'est toujours pas évident à comprendre. Ce sont pourtant les condensateurs les plus nombreux dans un récepteur de radio et c'est d'eux que dépend le bon fonctionnement du récepteur. Une valeur incorrecte de ces condensateurs (et parfois la façon de les câbler), peut expliquer un mauvais fonctionnement (accrochage, perte de sensibilité, ...).

UNE LOI ELEMENTAIRE
Rappel d'une loi élémentaire des circuits électriques :

Un courant électrique circule dans un circuit fermé.

Ce circuit fermé contient le générateur qui produit le courant.

Sur un schéma de poste radio, cela n'est pas toujours évident à voir.

Cherchons par exemple le circuit fermé emprunté par le courant de repos (sans signal à amplifier) qui traverse une triode BF.

On a représenté ici le sens de circulation des électrons, le sens conventionnel du courant est le sens inverse.

A l'intérieur de la triode, le courant d'électrons, circule de la cathode vers l'anode. Il traverse ensuite l'impédance de charge Zp (résistance, transformateur , haut-parleur,...) puis l'inductance de lissage L, la diode de redressement D, le secondaire du transformateur d'alimentation, la résistance de polarisation Rk pour revenir à la cathode. On a donc bien parcouru un circuit fermé dans lequel le secondaire du transformateur d'alimentation joue le rôle du générateur.

Il faut noter que la diode ne conduit pas tout le temps. Quand la diode D est bloquée, le courant circule par les condensateurs C1 et C2 qui jouent alors le rôle de générateur en se déchargeant.

QUAND LA LAMPE TRAVAILLE...

Quand on applique une tension à amplifier entre la grille et la cathode (tension Vgk), on fait varier le courant de repos.

On peut considérer que le courant total qui traverse la lampe est la somme de deux courants :
- le
courant de repos vu dans le cas précédent,
- un
courant variable, créé par la lampe.

Tout se passe comme si la lampe contenait un générateur G, fournissant un courant variable qui s'ajoute au courant de repos.

On ne s'intéressera maintenant qu'à ce courant variable, qui est le plus important puisqu'il correspond au signal à amplifier.

Problème : Par quel circuit fermé le courant variable produit par le générateur G va-t-il circuler ?

La seule chose que l'on demande à ce courant est de traverser l'impédance de charge Zp. Ensuite l'idéal serait qu'il revienne à la cathode le plus directement possible, sans rencontrer d'obstacles.

CONDENSATEURS ET BOBINES EN ALTERNATIF SINUSOÏDAL
Rappelons que les condensateurs "laissent passer le courant alternatif" et arrêtent le courant continu.
Un condensateur laisse passer le courant alternatif, mais lui oppose quand même une certaine " résistance ". Le terme résistance est incorrect car un condensateur ne chauffe pas, et il vaut mieux employer le mot "impédance" .

Cette impédance est donnée par la relation :

Une bobine, laisse passer le courant continu et s'oppose au courant alternatif en lui présentant une impédance :

 TRAJET DU COURANT VARIABLE PRODUIT PAR LA LAMPE...

Fixons quelques valeurs numériques :

- inductance de lissage : L = 10 H
- condensateur de filtrage : C2 = 22 µF
- résistance de cathode : Rk = 1000
W
- fréquence du courant variable : f = 1000 Hz
(amplificateur BF) .

 Impédance de C2 = 1/(6.28 * C2 * f) = 7,2 W
Impédance de la bobine = 6,28 * L * f = 62 800 W

Le courant variable, créé par la lampe, traverse l'impédance Zp.

Arrivé au point A il a le choix entre 2 voies :
- la bobine de lissage qui lui présente une impédance de 62 800
W
- le condensateur C2 qui lui présente une impédance de 7,2
W

Le courant emprunte la voie la plus facile c'est à dire le condensateur C2 et remonte à la cathode par la résistance Rk.

 On a bien repéré le circuit fermé dans lequel circule le courant, mais la traversée de Rk est une gêne inutile pour ce courant et cela va de plus perturber le fonctionnement de la lampe.
En effet, ce courant variable à travers Rk provoque des variations de la tension de cathode. Une étude plus précise montre qu'il en résulte une " contre-réaction " qui va diminuer le gain de l'étage.
(dans certains cas cet effet de " contre-réaction " est recherché, car s'il diminue le gain, il augmente la bande-passante du montage).

 LE MONTAGE IDEAL

Pour gêner le moins possible le courant variable créé par la lampe, il faut le renvoyer le plus directement possible à la cathode après qu'il ait traversé l'impédance Zp.
D'ou le montage ci-contre :

Le condensateur Ck doit avoir une impédance très faible devant Rk pour que le courant emprunte bien le trajet marqué en pointillés.

Exemple : pour une fréquence de 1000 Hz
Rk = 1000
W
Ck = 22 µF (impédance = 7,2 W à 1000 Hz)

Ce montage idéal n'est cependant jamais utilisé car il présente un inconvénient. Le condensateur Ck, de forte valeur (en BF), doit supporter la haute tension, ce qui en fait un composant cher et volumineux.

 MONTAGE HABITUEL

Bien que moins bon, puisque le courant variable produit par la lampe doit traverser C2, ce montage est utilisé car le condensateur Ck ne supporte que quelques volts (tension de polarisation de la lampe). 

 PREMIERE CONCLUSION
Il faut voir dans le condensateur C2 autre chose que le " deuxième condensateur de filtrage ". C'est par lui que circulent les courants variables créés par les lampes du récepteur.

En vieillissant (condensateur " sec "), il peut présenter une impédance trop forte et provoquer un mauvais fonctionnement de tous les étages amplificateurs. Cela ce traduit en particulier par des " accrochages ".

En haute fréquence, les condensateurs chimiques ne sont pas très performants . Il est conseillé de mettre un condensateur isolé au papier (ou autre isolant plus moderne) de 0,1 µF, en parallèle sur C2 afin d'assurer un passage plus sûr aux courants de haute fréquence et d'éviter ainsi d'éventuels accrochages.

 CAS DES LAMPES A GRILLE ECRAN

La grille écran est alimentée par la résistance Re qui sert à fixer la tension de cette électrode. Cette grille intercepte une partie du courant variable qui traverse la lampe.
Si on ne prend aucune précaution, ce courant variable engendrera une tension variable aux bornes de Re et fera donc varier la tension sur la grille écran.

Là aussi, il faut éviter que ce courant variable traverse la résistance Re en lui offrant un chemin plus facile pour rejoindre la cathode.
C'est le rôle du condensateur Ce.

Exemple : étage moyenne fréquence à f = 455 kHz,
Rk = 350
W, Re = 80 kW, Ce = Ck = 0,1 µF.
Les condensateurs Ce et Ck offre chacun une impédance de 3,5
W et assurent donc le passage du courant.

On remarque qu'il serait plus logique de relier Ce à la cathode, mais pour des raisons de facilité de câblage on relie ce condensateur à la masse.

 DECOUPLAGE RIGOUREUX et CABLAGE IDEAL
Comme indiqué plus haut, le second condensateur de filtrage C2 est traversé par la composante variable des courants d'anodes.
Dans le cas d'un poste superhétérodyne, ce condensateur C2 est un véritable " boulevard " qui voit donc passer :

- un courant à la fréquence de l'oscillateur local,

- deux courants à la fréquence de 455 kHz provenant de la lampe mélangeuse et de la lampe moyenne fréquence

- deux courants à basse fréquence provenant de la lampe BF et de la lampe de puissance.

Tout ces courants interagissent dans le condensateur C2 et il peut en résulter un mauvais fonctionnement du récepteur (accrochages HF, motor-boating en BF, ...).

Autrement dit tous les étages du postes sont "couplés" entre eux par le condensateur C2 qui est commun à tous les étages.
L'idéal est de " découpler " les divers étages pour les rendre indépendants et diminuer ainsi les causes de mauvais fonctionnement.

Le schéma ci-dessous montre un étage moyenne fréquence et un étage basse fréquence parfaitement "découplés". Le courant variable créés par chaque lampe emprunte un circuit qui lui est propre.

Les résistances Ra1 et Ra2 dont destinées à "dissuader" les composantes variables des courants de plaque d'aller vers C2 et à les forcer à passer les condensateurs Ca1 et Ca2 qui offrent un chemin plus facile pour rejoindre les cathodes respectives de chaque lampes.

Exemple :

Etage basse fréquence : fréquence f = 50 Hz à 5 000 Hz.

Il faut faire les calculs avec la fréquence la plus basse
(cas le plus défavorable) f = 50 Hz.

Ra1 = 47 kW
Ca1 = 10 µF (impédance 320 W à 50 Hz, très faible devant Ra1)

Etage moyenne fréquence : f = 455 kHz .

Ra2 = 2,2 kW

Ca2 = 0,1 µF (impédance = 3,5 W très faible devant Ra2)

Pour faire un câblage " dans les règles de l'art ", il faut bien matérialiser les points de masse M1 et M2. On est sûr ainsi que les composantes alternatives empruntent bien le chemin le plus direct sans aller se disperser dans la tôle du châssis.